Hit & Run – Saison 1

Faux-semblants

Hit & Run est une série diffusée par Netflix depuis le 6 août 2021, la première spécifiquement créée par la branche israélienne de la plate-forme. C’est donc sans surprise que l’on retrouve, à l’écriture, la production exécutive et devant la caméra, l’acteur Lior Raz, l’antihéros de l’excellente série Fauda. Elle ne compte pour l’instant qu’une saison de 9 épisodes, et le flou plane encore sur son futur, même si sa fin et le succès rencontré laissent, à mon humble avis, peu de doutes sur l’annonce, dans les semaines ou les mois à venir, d’une suite. Outre Raz, le casting se partage entre, en gros, deux tiers d’actrices et d’acteurs israéliens, et un tiers de comédiens américains (une grosse partie de l’intrigue se déroule à New York), dont Sanaa Lathan et Gregg Henry. Comme pour Fauda, seuls certains dialogues (ceux utilisant l’anglais dans la VO) sont doublés, tandis que l’Hébreu est sous-titré (dans Fauda, cette dernière langue était doublée, tandis que les scènes en arabe bénéficiaient de sous-titres).

Comme dans son rôle précédent, Lior Raz incarne un type bien énervé, franc-tireur, mais ce côté brut de décoffrage est compensé par beaucoup d’émotion, ce qui est normal vu le point de départ puis les développements de l’intrigue. Si Hit & Run ne se hisse pas aux hauteurs cyclopéennes de Fauda (sans doute la meilleure série d’action / espionnage depuis 24 Heures chrono), c’est malgré tout un excellent thriller politique / d’espionnage au scénario très travaillé, complexe mais qui ne perd jamais le spectateur. Et clairement, vu la fin, on se dit qu’une hypothétique saison 2 risque d’envoyer du lourd. Si vous avez aimé les aventures de Doron ou celles de Jack Bauer, que vous appréciez les thrillers qui, pourtant, sont riches en émotion, et que vous avez accès à Netflix, je vous conseille donc d’y jeter un coup d’oeil (et je ne doute absolument pas que vous enchaîniez sur Fauda ensuite 😉 ). Lire la suite

Sexify – Saison 1

Un énorme « Fuck ! » adressé aux ultra-conservateurs polonais… mais pas que !

Sexify (stylisé Sex!fy) est une série polonaise disponible en français sur Netflix depuis fin avril 2021. Au moment où je rédige ces lignes, et pour ce que j’en sais, son statut est encore flou : j’étais persuadé qu’il s’agissait d’une mini-série, bouclée en 8 épisodes d’une cinquantaine de minutes maximum chacun, mais sa fin très ouverte et le flou entretenu par la plate-forme de streaming me laissent à penser qu’une seconde saison est tout à fait possible, sinon probable vu l’accueil critique très favorable qui lui a été réservé.

Présentée comme un show sexy et comme une comédie, Sexify est en fait considérablement plus que cela : c’est non seulement une ode à l’émancipation de la femme, à l’exploration de ses désirs, ses envies, c’est non seulement une jolie histoire d’amitié et d’amour, mais c’est aussi l’histoire de la libération d’une génération des carcans dans lesquels l’ont enfermée celle qui l’a précédée et la société du pays où l’histoire se déroule. Et celui-ci a une importance capitale : si Sexify avait été conçu et diffusé partout ailleurs, par exemple aux USA, voire en France, elle ne serait qu’une série vaguement sulfureuse de plus, bien que fort sympathique. Seulement voilà, c’est un show polonais, vous savez, ce pays de mes ancêtres, côté paternel, où l’église catholique reste toute-puissante, où la société est extrêmement prude et conservatrice, où le nationalisme est exacerbé et où l’étranger, même slave, blanc et chrétien, est vu d’un œil suspicieux. Inutile, donc, de dire qu’une série tournant entièrement autour du sexe, de l’orgasme féminin, de l’émancipation de trois jeunes femmes et réservant une place de choix, au niveau des rôles secondaires ou des figurants, à la diversité, où l’homosexualité, les drogues, la masturbation et même, horreur, le sexe avant le mariage sont au centre du propos ne peut constituer que le plus gros « FUCK » de toute l’histoire des séries (en tout cas polonaises) ! Lire la suite

Ava – Tate Taylor

Casting 5 étoiles, film 2 étoiles

AvaAva est un film américain réalisé par Tate Taylor, sorti cet été au cinéma et en VoD en Hongrie et aux USA, et aujourd’hui sur la version française de Netflix. Il met en vedette Jessica Chastain, plus un nombre conséquent d’actrices et d’acteurs connus. Sur ce plan là, il a tout l’air de relever d’un film d’action / thriller de premier plan, mais assez rapidement, le scénario prend l’eau de toutes part, et en fin de compte, on aboutit à un film que seules certaines performances (dont celle de son actrice principale) et les scènes d’action sauvent (tout juste) du naufrage. Contrairement à mes habitudes, je ne vais donc vous conseiller de vous lancer là-dedans que pour le côté castagne (et encore, comme nous le verrons, il y a des choses à dire), pas dans l’espoir d’y trouver un film solide. Et pourtant, respectant beaucoup les qualités d’actrice de Miss Chastain, il m’est franchement pénible d’écrire cela, même si elle n’est pas responsable du côté incontestablement bancal de ce long-métrage. Lire la suite

Unbelievable

Mais si, il faut y croire ! 

UnbelievableUnbelievable (qu’on traduira par « difficile à croire » plutôt que par « incroyable ») est une mini-série américaine en 8 épisodes disponible depuis le 13 septembre 2019 sur Netflix. Elle est basée sur des faits réels et apparemment très peu romancée. Elle décrit la traque d’un violeur en série ayant sévi dans l’État de Washington (donc dans la région de Seattle, puisque la ville de Washington est située, elle, dans le District de Columbia, de l’autre côté du pays) et dans le Colorado. La série est basée sur un article publié en 2015, ayant obtenu le prix Pulitzer et qui a décrit avec minutie toutes les étapes de l’enquête (ainsi que certaines de ses insuffisances).

D’une sobriété exemplaire vu le sujet, aussi peu proche d’une série policière américaine moyenne qu’il est possible de l’être, Unbelievable est remarquable sur bien des plans, comme je vais essayer de vous le démontrer. Le public et la critique ne s’y sont d’ailleurs pas trompés, puisqu’elle a reçu ce que l’on peut qualifier sans hésitation d’accueil triomphal : 95% sur Rotten Tomatoes et 82% sur Metacritic. Lire la suite

Mindhunter – Saisons 1 & 2

Une série aussi dure qu’elle est intéressante

mindhunter_saison_2Mindhunter est une série co-produite (entre autres) par David Fincher et Charlize Theron, le premier s’étant lancé dans ce projet après que la seconde lui ait fait lire le livre Mindhunter : Dans la tête d’un profileur de John E. Douglas, ex-agent du FBI et un des inventeurs des techniques de profilage des tueurs en série, dont les shows et films policiers américains nous ont rendu familiers au fil des années. L’intérêt pour ce sujet n’a d’ailleurs rien d’étonnant de la part de Fincher, puisqu’il a déjà réalisé deux excellents longs-métrages sur le sujet, Seven et Zodiac. La saison 1 (10 épisodes) est disponible depuis 2017 sur Netflix, la saison 2 (9 épisodes) depuis le 16 août 2019. Fincher a déclaré avoir l’intention de proposer 5 saisons. Signalons que la durée des épisodes est à géométrie variable : certains font environ 35 minutes, d’autres dépassent 1h10 !

La série suit trois personnages, deux agents du FBI et une psychologue, qui vont créer, à partir de rien, une méthodologie pour classifier ce qui ne s’appelle pas encore les tueurs en série (terme qu’ils vont inventer) déjà emprisonnés, et surtout pour être capable, à partir de ces données, de prédire les actions ou le profil de ceux qui ne sont pas encore sous les verrous. Ce trio de protagonistes, bien qu’il ne porte pas les noms des vrais agents spéciaux ou de l’experte qui ont été impliqués dans les véritables événements, est cependant totalement modelé sur eux. Ainsi, Holden Ford (joué par Jonathan Groff) est basé sur l’auteur du livre sur lequel s’appuie la série, John E. Douglas, tandis que Bill Tench (incarné par l’acteur Holt McCallany) correspond au pionnier des sciences comportementales du FBI, Robert K. Ressler, et que le personnage de Wendy Carr, la psy jouée par Anna Torv, est l’équivalent d’Ann Burgess, professeur d’une université privée de Boston qui a aidé à la mise en place des protocoles.

En deux mots, il s’agit vraiment d’une très grande série, qui ne sera cependant visible que si vous avez le cœur bien accroché : elle ne joue pas vraiment sur le gore, mais en revanche, elle est riche en interviews de tueurs en série célèbres (je vais en reparler), qui n’épargnent rien au spectateur en matière de violences physiques ou sexuelles. Et lorsqu’on sait que tout est réel… Bref, à réserver à un public capable d’encaisser une telle horreur verbale et psychologique, qui sera cependant récompensé par une série en tous points (ou presque) parfaite. Lire la suite

The boys – Saison 1

Sanglant, cynique, profond, touchant, et… drôle ! 

the_boysThe boys est une série dont la première saison a débarqué il y a quelques jours sur Prime Video, et qui avant même sa mise en ligne, a déjà été renouvelée pour une seconde (et disons-le tout de suite, c’est totalement mérité et justifié). C’est une série de super-héros, mais disons-le clairement, à part à la rigueur le film Watchmen, elle n’a presque rien à voir (en tout cas en terme de ton et de violence, voire de gore) avec le reste de la production ciné / TV dans ce domaine. Comme l’image ci-contre l’évoque, elle est tirée d’un comic, mais d’après les spécialistes dans le domaine, elle a su s’en démarquer sur la forme (souvent provocatrice un peu puérilement) pour en conserver l’essentiel, à savoir l’esprit.

À condition de ne pas être allergique à la violence, au sexe et au gore, The boys est un show à ne rater sous aucun prétexte, que ce soit sur le plan des œuvres de super-héros (où elle constitue sans conteste une nouvelle référence, désormais) ou sur celui, plus large, des séries, car c’est, à mon sens, clairement la sortie de l’année (en tout cas, ce ne sont pas les shows de SF récents de Netflix, Nightflyers ou l’à-peine moins mauvais et lui aussi très récent Another Life qui risquent de lui faire concurrence !). Lire la suite

Fauda – Saison 1

Tout en nuances

fauda_saison 1Fauda (ce qui signifie « chaos » en arabe) est une série israélienne qui compte actuellement deux saisons, la troisième devant débarquer cette année. Elle a connu un développement « à la Braquo« , avec une diffusion de la première en 2015 et celle de la seconde à partir de décembre… 2017. Vous pouvez soit la visionner sur Netflix, soit acquérir des DVD (signalons d’ailleurs que l’intégrale des deux saisons est moins chère qu’une seule des deux à l’unité -vous trouverez des liens en fin d’article-). Cette critique ne porte que sur la saison 1, je vous parlerai de la 2 dans un autre article.

Elle est consacrée à une unité des Forces Spéciales de l’Armée israélienne composée de membres, féminins et masculins, capables de se fondre dans la population palestinienne, que ce soit du fait de leur physique, de leur pratique courante de la langue arabe (sans accent) ou de leur parfaite connaissance des coutumes, notamment religieuses, de l’adversaire. On y parle de la traque d’un terroriste du Hamas, surnommé « la Panthère », qui était supposé avoir été tué un an et demi auparavant par le chef de l’unité mais qui se révèle être bien vivant. La tentative pour le capturer ou le tuer pour de bon va se solder par une spirale meurtrière de contre-attaques et de ripostes, meurtrissant les deux camps.

Alors soyons clair, une série israélienne utilisant des membres du Hamas comme antagonistes aurait facilement pu sombrer dans une propagande manichéenne similaire à celle de la série turque Börü (également disponible sur Netflix). Rien de tel ici : un des intérêts majeurs de Fauda est dans la nuance adoptée, aucun des deux camps, palestinien ou israélien, n’ayant le monopole de la cruauté ou de la compassion. Si on ajoute à cela un bluffant réalisme et d’excellents acteurs, on tient là une série certes extrêmement dure, mais de tout premier plan. Lire la suite

Le grand jeu – Aaron Sorkin

Jessica Chastain propose à nouveau une performance de haut niveau

le_grand_jeu_chastainLe grand jeu (en VO : Molly’s game) est un film américain écrit et réalisé par Aaron Sorkin, qui était jusqu’ici un scénariste de renom (on citera par exemple Des hommes d’honneur, The social network ou Steve Jobs) et qui passe ici pour la première fois derrière la caméra (et autant le dire tout de suite, ce coup d’essai est un coup de maître). Basé sur une histoire réelle, le long-métrage met en vedette Jessica Chastain dans le rôle de Molly Bloom, Idris Elba dans celui de son avocat et Kevin Costner dans celui de son père. Au niveau des seconds rôles, les patronymes sont moins prestigieux, mais on notera toutefois la présence de Graham Greene dans le rôle du juge.

Grand fan de Jessica Chastain (de l’actrice et de la femme, qui représente pour moi un quasi-idéal de perfection sur tous les plans), je ne pouvais évidemment pas passer à côté de ce film, ayant adoré sa filmographie récente. Et de fait, je ressors de mon visionnage une fois de plus épaté, ayant passé un excellent moment.  Lire la suite

Zodiac – David Fincher

Une enquête exceptionnelle

zodiac_fincherZodiac est un film réalisé par David Fincher, sorti en 2007. Il est basé sur un livre (pas un roman, attention) écrit par Robert Graysmith (joué, dans le long-métrage, par Jake Gyllenhaal) et publié en 1986. Il y raconte toutes les étapes de la traque d’un tueur en série, qui se faisait appeler le Zodiac (peut-être du nom d’une marque de montres), qui a terrorisé la Californie à la toute fin des années soixante et dans les années soixante-dix. Précisons-le tout de suite, si le film, comme le livre sur lequel il est basé, donne un sérieux faisceau de présomptions pointant vers une personne précise, il ne fournit pour autant aucune réponse ferme et définitive. D’ailleurs, même aujourd’hui, notamment via les analyses ADN, aucune certitude n’existe, même si l’enquête reste ouverte dans certains des comtés californiens qui ont eu à déplorer des victimes.

Ce qui rend ce film assez hors-normes est à la fois sa longueur (2h40), le fait que les policiers et journalistes impliqués dans l’enquête soient beaucoup plus mis en avant que le tueur, ainsi qu’une réalisation qui fait largement l’impasse sur les scènes de type thriller, d’action ou sanglantes (même si elles sont présentes, surtout au début du film), pour se concentrer minutieusement sur la recherche d’indices, de suspects, la construction de théories, etc. Cela n’exclut pas du tout les scènes puissantes, bien au contraire (on pense à celle où, en 1983, Graysmith va dans le magasin où travaille le suspect), mais tranche avec le traitement habituel de la thématique du tueur en série au cinéma américain. Notamment dans un film qui a, lui aussi, été (cette fois indirectement) inspiré par cette affaire, et qui n’est rien de moins que… L’inspecteur Harry, sorti en 1971 (et dont une séance est d’ailleurs montrée dans le film de Fincher).  Lire la suite