Wika et la fureur d’Obéron – Day / Ledroit

Tout simplement splendide

wika_t1Wika est une série de BD, prévue en quatre volumes (deux sont parus au moment où je rédige ces lignes), dessinée par Olivier Ledroit, aux dialogues écrits par Thomas Day, et co-scénarisée par les deux hommes. Elle représente un peu la fusion parfaite des différentes facettes de l’oeuvre du premier (l’univers féerique, le côté gothique de Requiem, l’importance des yeux et du regard de Sha, les personnages parfois très comics, le contexte médiéval-fantastique sorti tout droit des Chroniques de la Lune Noire, le côté très, très sexy, voire érotique, des personnages féminins) et du second (le côté Steampunk, l’écriture particulièrement soignée et évocatrice sans être pédante), mais combinée dans une sorte de brainstorming un peu psychédélique et pourtant très réussi. En effet, à la base, il s’agit d’une relecture gothique et médiévale-fantastique du Songe d’une nuit d’été de William Shakespeare, généreusement agrémentée, de plus, d’éléments Steampunk, de la légende Arthurienne et de mythologie… scandinave ! 

Univers et intrigue

A la base, le contexte est médiéval-fantastique, et pas si éloigné des Chroniques de la Lune noire que ça (d’ailleurs, le passage de la formation de voleuse de Wika fait furieusement penser à celui dans lequel Pile-ou-face explique la vie à Wismerhill). Sauf qu’il y a des fées / elfes qui ressemblent à ceux de cette dernière série, mais avec des ailes de papillon (ceux qui ont lu l’Univers féerique d’Olivier Ledroit ne seront pas surpris) et, pour certains, des tenues et des appareillages ou armes Steampunk (on retrouve en partie l’atmosphère et les visuels de Fées et amazones, des deux mêmes auteurs), et pour d’autres des armes et des armures très gothiques. Leur chef, le redoutable Obéron, est un peu vénère sur les bords parce que sa meuf, la sublime Titania, est un peu partie voir ailleurs et en a profité pour engendrer une fille, Wika. Avec sa nouvelle compagne, une redoutable lycanthrope descendante de Fenrir et au très mauvais caractère, il va donc lancer l’assaut sur le château de Grimm (^^) histoire d’un peu torturer, mutiler, violer et zigouiller tout le monde (et pas nécessairement dans cet ordre). La vaillante Titania confiera alors son bébé au maître d’armes Haggis, un Faune qui a pour mission de lui couper ses embryons d’ailes de fée et de la cacher là où nul ne la cherchera ou reconnaîtra.

Dans la seconde partie de l’histoire de ce tome 1, nous suivons Wika, désormais adolescente, dans la capitale de la contrée, Avalon (^^), où elle fait la rencontre d’un jeune et beau voleur local. Parallèlement, Obéron, qui a développé une aversion pour la magie et une forte attirance pour une technologie de type Steampunk, traque les fées majeures, à l’aide de ses sept enfants, tous plus redoutables et cruels les uns que les autres.

Comme vous pouvez le constater, il y a dû y avoir un sacré brainstorming entre les deux co-auteurs pour accoucher d’un univers combinant autant de références littéraires ou autres (BD, jeux de rôle, etc) disparates. Le résultat aurait pu être grotesque ou sonner artificiel, mais pourtant il n’en est rien, tout semble naturel et se révèle franchement réussi. Le contexte, l’atmosphère, le scénario, donc, sont les premiers points forts de cette BD. Et pourtant, ils ne constituent pas son principal attrait !

Dessin et écriture

Les gens qui me suivent depuis un moment le savent peut-être, mais Olivier Ledroit est, et depuis très longtemps (j’ai lu une de ses BD pour la première fois en 1989), une de mes trois références absolues en matière de dessin fantasy (les deux autres étant Wayne Reynolds et John Blanche). Je l’ai découvert avec le premier tome des Chroniques de la Lune noire, lorsque j’avais 14 ans, et son graphisme très particulier m’a projeté quatre ans en arrière, à l’époque où les illustrations des Livres dont vous êtes le héros m’ont ouvert la porte vers un univers Fantastique bien différent, et bien plus attractif, par rapport à notre triste réalité quotidienne. Aujourd’hui, à quasiment 43 ans, le pouvoir évocateur du trait de Ledroit reste intact, et il agit tel une DeLorean virtuelle pour me projeter, à nouveau, dans les rêves de dragons, d’elfes et d’épées de mon adolescence perdue.

Mais revenons à nos moutons. Si vous connaissez à la fois les Chroniques et l’Univers féerique et / ou Fées et amazones, le style et la qualité du graphisme ne vous surprendront pas. Sinon, attendez vous à un choc et à un émerveillement sans borne : le dessin est extrêmement soigné (ainsi que les couleurs), alternativement poétique et gothique (voire même parfois les deux à la fois), mélangeant féerie et érotisme soft (ce qui ne surprendra pas les connaisseurs de l’oeuvre de Ledroit, qui savent avec quel talent il est capable de représenter le corps et surtout le visage féminin), médiéval-fantastique et tenues, armes ou appareillages steampunk. Et surtout, il faut insister sur le côté grandiose, mélange de Druillet et de Richard Wagner, de la chose : nous sommes ici dans l’épique, dans le pleine page, dans le foisonnant. La ville d’Avalon est grandiose et vertigineuse, les corps d’une perfection inhumaine, les armes immenses, les visages parfaits. Et bien entendu, les combats sont é-pi-ques. Pour vous en convaincre, ou découvrir le style de ce dessinateur si vous ne le connaissez pas encore, je vous suggère d’aller voir cet aperçu de la BD sur le site de son éditeur…

Niveau graphisme, donc, c’est très soigné, et même chose au niveau de l’univers et du scénario. Qu’en est-il de l’écriture ? Personnellement, si j’aime beaucoup les cinq premiers tomes des Chroniques de la Lune noire, auxquels Ledroit a collaboré (avant de ne plus dessiner que les couvertures des autres), un point m’a toujours fait grincer des dents dans cette série : l’écriture de Froideval. Il possède un style bas de gamme que je trouve personnellement assez horrible et qui m’agace profondément. Rien de tel dans Wika, cependant : la virtuosité de l’écriture de Thomas Day n’est plus à prouver, et il livre une copie parfaite, dans un langage châtié sans être pédant, et avec une fluidité et une musicalité délectables. Bref, en plus de son apport à la conception de la série, son style soigné est un très, très gros plus de ce cycle par rapport aux Chroniques.

En conclusion

Mêlant les univers féérico-steampunk-fantastico-gothiques d’Olivier Ledroit et de Thomas Day, cette série de BD combine un contexte astucieux (mélangeant Shakespeare, Heroic Fantasy, mythologie nordique, esthétique et technologie victorienne rétrofuturiste, folklore féerique, et j’en passe) avec un graphisme de toute beauté, des couleurs soignées, et une écriture des dialogues qui l’est tout autant. Bref, que vous connaissiez ou appréciez les deux co-auteurs ou pas, voilà un achat qui me paraît tout à fait indispensable pour tout amateur de mondes graphiques marqués du sceau de l’imaginaire, de la mythologie et du Fantastique.

Pour aller plus loin

Si vous souhaitez avoir un deuxième avis sur cette BD, je vous conseille la lecture des critiques suivantes : celle de Célindanaé sur Au pays des Cave Trolls,

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